Fabienne ou Pissaps.

Fabienne a  45 ans et se bat contre une leucémie depuis Novembre 2018.

Merci Fabienne de nous raconter ton histoire.

Instagram : @pissaps

 

 

Quelle était ta vie « avant » le Cancer ?

Avant le cancer, j’avais une vie qui ressemblait à celle de tout le monde : un conjoint, deux garçons de 14 et 16 ans, un métier que j’adore, je suis professeur des écoles en élémentaire. Ma vie sociale était plutôt animée, rythmée de chouettes soirées entre copains, de restaurants entre copines, de repas de famille. Je faisais en moyenne 2h de sport par semaine juste de quoi me sentir en forme.

 

Comment as-tu découvert ton Cancer ?

Début novembre 2018, j’ai ressenti de fortes douleurs à la tête, ce qui ne m’arrivait que rarement. Voyant les douleurs persister, je suis allée voir ma bioénergéticienne car je ne suis pas fan des médecines conventionnelles. Elle m’a tout de suite alertée en me disant que cette fois, il fallait que je consulte un médecin car ce qu’elle ressentait n’était pas bon.

Je suis allée voir 2 médecins qui n’ont pas voulu me faire de prise de sang car en dehors de mes maux de tête, je semblais aller bien. Ils ont mis ça sur le compte du stress, sauf que de nature je ne suis pas quelqu’un de stressé et surtout je n’avais aucune raison à ce moment là d’être stressé.  Finalement, au bout de 3 semaines, j’étais clouée au lit, je n’avais plus aucune énergie. SOS médecins est venu et a demandé une prise de sang.

J’ai tout de suite eu l’impression que j’allais guérir, je ne comprenais pas encore que le chemin allait être si difficile mais au fond de moi je savais que ce ne serait qu’un dur moment à transformer en quelque chose de positif. Je n’ai ressenti ni colère, ni sentiment d’injustice, j’étais juste dans l’action du moment : on s’accroche et on y va.

Le 26 novembre, le médecin qui m’avait trouvée en forme m’a convoquée pour les résultats de la prise de sang : leucémie aigüe myéloblastique avec 67% de blastes (cellules cancéreuses) dans le sang et une immunité au plus bas.

Je suis allée le soir même dans un hôpital proche de chez moi et là toute ma vie a basculé.

J’ai tout de suite eu l’impression que j’allais guérir, je ne comprenais pas encore que le chemin allait être si difficile mais au fond de moi je savais que ce ne serait qu’un dur moment à transformer en quelque chose de positif. Je n’ai ressenti ni colère, ni sentiment d’injustice, j’étais juste dans l’action du moment : on s’accroche et on y va.

 

Comment se passent les traitements ?

Arrivée à l’hôpital, on m’a emmenée directement dans une chambre stérile car je n’avais plus assez de globules blancs pour me défendre contre la moindre maladie. A partir de ce moment-là, tout le monde autour de moi portait un masque, mes proches n’avaient plus le droit de me toucher.

Ce cancer n’a rien de commun avec les cancers solides. Les cellules cancéreuses sont dans le sang donc tous les globules sont à la baisse. Arrivée à l’hôpital, on m’a emmenée directement dans une chambre stérile car je n’avais plus assez de globules blancs pour me défendre contre la moindre maladie. A partir de ce moment-là, tout le monde autour de moi portait un masque, mes proches n’avaient plus le droit de me toucher.

J’ai eu rapidement un myélogramme. C’est une ponction dans le sternum pour que les docteurs étudient la moelle osseuse, qui est l’usine à globules. Ce myélogramme a confirmé 2 choses : que j’avais une leucémie aigüe myéloblastique à pronostic défavorable et que j’avais une anomalie génétique sur un chromosome qui s’est mal dupliqué.

Il existe beaucoup de leucémies différentes mais pour la mienne, j’ai dû passer par 3 cycles de chimiothérapie et une greffe de moelle osseuse.

Concernant les leucémies, une fois de plus, les cycles de chimiothérapie n’ont rien à voir avec les cancers solides. Cela ne peut pas se faire en hospitalisation de jour, on est obligatoirement hospitalisé environ 4 semaines pour chaque chimiothérapie car elle détruit à la fois les blastes mais aussi les globules sains. De ce fait, nous sommes à chaque fois en aplasie (plus assez de globules blancs pour se défendre des virus, infections etc..).

Je n’étais plus que l’ombre de moi-même. La peau de mes mains partait en lambeaux, j’avais beaucoup de saignements car peu de plaquettes et des transfusions de sang quasiment tous les jours. Mais fort heureusement, la chimiothérapie a fait son travail.

J’ai eu :

1) une cure d’induction avec de la chimiothérapie 24h/24 et 7 jours/7.

Cette cure d’induction a été la plus difficile. Mon corps qui ne prenait jamais de médicaments autres que des produits naturels a eu bien du mal à se faire à toute la toxicité de la chimiothérapie. Je suis restée 10 jours alitée sans pouvoir bouger de mon lit, parfois avec un masque à oxygène.

Je n’étais plus que l’ombre de moi-même. La peau de mes mains partait en lambeaux, j’avais beaucoup de saignements car peu de plaquettes et des transfusions de sang quasiment tous les jours. Mais fort heureusement, la chimiothérapie a fait son travail. Au bout d’une semaine de cure, je n’étais plus qu’à 5% de blastes. J’ai attendu de sortir d’aplasie et suis rentrée chez moi le 24 décembre pour 15 jours au bout de 4 semaines d’hospitalisation.

2) deux cures de consolidation en janvier et février avec une chimiothérapie moins forte. Pendant ces 2 cures, j’ai pu rentrer chez moi quelques jours après la chimiothérapie en attendant l’aplasie. J’avais donc une infirmière qui venait me faire des prises de sang tous les 2 jours. Quand l’aplasie arrivait, je retournais en chambre stérile pour 15 jours environ.

Pendant ces 2 cures, je n’ai pas eu trop d’effets secondaires à part une extrême fatigue et une kératite aux yeux.

3) une greffe de moelle osseuse car ma leucémie est très récidivante c’est donc le seul moyen d’éviter les rechutes même si la greffe ne garantit pas non plus une guérison définitive. Étant fille unique, mes enfants trop petits et ma maman trop âgée, les médecins ont interrogé le fichier international de donneur de moelle osseuse pour trouver un donneur compatible. J’avais une chance sur 1 million et ils ont trouvé un donneur en Angleterre. Début mars, je suis rentrée à l’IGR et j’ai eu 15 jours de conditionnement à la greffe. Cela consiste à détruire la moelle malade et donc, de nouveau j’ai reçu plusieurs chimiothérapies différentes et très fortes et un traitement permettant de préparer la cohabitation avec le futur greffon.

J’ai été greffée le 19 mars 2019. Une greffe de moelle osseuse n’est pas une opération, c’est exactement la même chose qu’une transfusion mais avec des cellules souches (les mamans globules) du donneur. Cela a pris 30 minutes.

Je suis restée 6 semaines en chambre stérile.

Comment a réagi ton entourage à l’annonce de ton Cancer ?

Mais très rapidement, tout le monde a compris que j’avais besoin de positivité. Alors, telle une armée de soldats tous mes proches, mes amis étaient derrière moi. Je recevais des messages par dizaines, des visites, des cadeaux.

Mon mari a eu du mal les premiers jours, il n’y croyait pas. Mes 2 garçons ont été choqués le soir de mon départ précipité à l’hôpital. Mais très rapidement, tout le monde a compris que j’avais besoin de positivité. Alors, telle une armée de soldats tous mes proches, mes amis étaient derrière moi. Je recevais des messages par dizaines, des visites, des cadeaux. Ma maman aujourd’hui décédée venait tous les jours, mon conjoint aussi et mes enfants dès que c’était possible. Fin janvier, j’ai créé un compte instagram, depuis je peux compter sur cette communauté pour me soutenir au quotidien en plus de tous mes proches.

Mes collègues d’école ont été formidables. Je n’étais dans cette nouvelle école que depuis 2 mois quand j’ai eu ma leucémie et pourtant elles ont veillé sans relâche sur moi. Ma hiérarchie a été bienveillante.

 

Comment est ton quotidien aujourd’hui ?

En rentrant chez moi, les premiers jours j’étais incapable de marcher tellement j’étais fatiguée et parce que dans une chambre de 15m2 pendant 6 semaines sans aucune possibilité de sortir et bien les muscles ne fonctionnent plus.

De plus, étant sous immuno- suppresseurs pour la greffe, j’ai eu beaucoup de contraintes pendant 6 mois. Il faut comprendre que mes globules sont des bébés et ne sont pas encore assez forts pour m’éviter de tomber malade. Mais tomber malade pour moi peut être embêtant par rapport à quelqu’un qui est en bonne santé.

Pendant 6 mois, j’allais à l’hôpital toutes les semaines. Je ne pouvais pas aller dans un lieu public, magasin, cinéma, transports en commun etc…Je n’avais pas le droit de faire des soirées entre amis, j’avais une alimentation protégée et stricte : pas d’aliments crus, pas d’eau du robinet, pas de charcuterie, de fromage au lait cru. J’avais également des consignes d’hygiène strictes : me nettoyer très souvent les mains, faire couler l’eau avant de prendre une douche etc..

Pendant 6 mois, j’allais à l’hôpital toutes les semaines. Je ne pouvais pas aller dans un lieu public, magasin, cinéma, transports en commun etc…Je n’avais pas le droit de faire des soirées entre amis, j’avais une alimentation protégée et stricte : pas d’aliments crus, pas d’eau du robinet, pas de charcuterie, de fromage au lait cru. J’avais également des consignes d’hygiène strictes : me nettoyer très souvent les mains, faire couler l’eau avant de prendre une douche etc..

Forcément tout ça a changé l’organisation de la famille, mon conjoint s’occupait des courses, de faire à manger, les enfants sont devenus plus autonomes pour leurs devoirs par exemple et j’ai eu le droit à des heures de ménage par la mutuelle de mon conjoint.

Financièrement, cela n’a pas changé ma situation car pour le moment, je suis payée normalement.

Aujourd’hui, je suis à presque 7 mois de greffe. Le combat n’est pas gagné, une rechute est toujours possible mais quoiqu’il arrive je suis prête car si bien entourée. Je suis partie 4 jours et j’ai marché énormément comme quoi tout est possible. Je continue à avoir 2 séances de kiné par semaine et j’ai toujours des contrôles réguliers à l’IGR. Je peux maintenant faire beaucoup plus de choses chez moi et tout va en s’améliorant.

J’ai en effet plusieurs projets. Le premier de finaliser un petit document qui expliquera à ceux qui le souhaitent quelles ont été mes ressources dans ce combat.

Le deuxième est de devenir bénévole dans l’association Laurette Fugain pour promouvoir le don de sang si possible auprès des jeunes lycéens car les malades ont besoin de globules rouges, de plaquettes tous les jours. Sans don, je n’aurais pas survécu. Et puis, je veux aussi promouvoir le don de moelle osseuse car sans mon donneur inconnu je ne serai pas là pour témoigner. C’est important, indolore mais il n’y a pas assez d’informations sur le sujet.

Enfin, la reprise de mon travail est un projet également. Ce ne sera pas facile, car pour le moment je n’ai aucune immunité, je ne suis plus vaccinée et mon corps a oublié les maladies infantiles que j’ai eu. Retourner dans une école est aujourd’hui impossible mais j’ai bon espoir pour septembre 2020.

Quel message aimerais-tu faire passer à une personne qui vient d’apprendre qu’elle a un Cancer ?

Et surtout, n’oubliez jamais que le temps s’écoule quoiqu’il arrive donc profitez des bons moments et attendez que l’orage passe dans les mauvais moments.

Je dirais : faites confiance à la médecine, et faites confiance à votre corps. Visualisez des choses positives, armez-vous de patience car oui le chemin est long et douloureux. Sortez votre boite à outils du placard et partez à la recherche de ce qui est bon pour vous.

Et surtout, n’oubliez jamais que le temps s’écoule quoiqu’il arrive donc profitez des bons moments et attendez que l’orage passe dans les mauvais moments.

Et quel conseil aimerais-tu donner à ses proches ?

Ne cherchez pas les mots, il n’y en a pas.

Ne cherchez pas les mots, il n’y en a pas. Ne vous mettez pas de pression sur comment vous devez être face au cancer d’un de vos proches, de la bienveillance c’est tout. Soyez juste là tous les jours pour votre proche, à l’écoute et dites que vous comprenez la souffrance, la peur…Quand c’est possible, proposez une sortie, n’arrêtez jamais de rire et d’y croire.

 

Peut-on te suivre sur les réseaux ?

On peut me suivre sur mon compte Instagram @pissaps. Je raconte tout depuis fin janvier. Le partage c’est sacré quand on a vécu ce tsunami et la leucémie ce n’est pas un cancer dont on parle beaucoup donc ce compte est un moyen d’aider, de donner de l’espoir à de futurs malades et il est pour moi une source de joie quand je vois toute la bienveillance que l’on m’envoie chaque jour.

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